Est-ce entre le majeur et l’index, dans un coin de la tête que se trouve le libre arbitre ? de Antonio Albanese

Rentrée littéraire romande

C’est avec ce petit livre au titre étonnant que nous poursuivons notre série consacrée aux livres d’auteurs romands parus récemment.

photo-0Il y a ce titre énigmatique, et puis cette couverture toute en hauteur, ce crâne rouge, ce crâne qui semble sourire au lecteur. Avant même de lire la première page, ce livre est un bel objet, le velouté du papier, les pages emplies de caractères qui se dessinent comme des images…

Le dossier de presse évoque un « OVNI, un objet verbal normalement irréaliste, aussi inouï par sa forme que par son fond ». La forme nous l’avons dit est particulièrement soignée, entre jeux de typographies et de cadres, utilisation de différentes graisses ou d’italique, répartition spatiale de l’écrit sur la page vierge.

La trame est constituée par ces cinquante mots (violent, uniforme, recherche, multiple, mous, lent, …) tirés d’une pièce du compositeur d’origine hongroise Istvàn Zelenka, qui agissent comme cinquante repères dans l’écriture de ce « journal de mon libre arbitre ». Chacun de ces mots ouvre vers quelque chose, donne prétexte ici à une réflexion, là à un extrait de dialogue, un poème, la restitution d’un souvenir. La recherche du libre arbitre — plus précisément, des conditions d’exercice du libre arbitre — apparait comme le fil conducteur de l’ouvrage : « pourquoi est-ce que je pense comme je pense ? » s’interroge l’auteur. S’agit-il pour autant d’un livre « philosophique » ? Nous parlerons plutôt de « variations philosophiques », tant l’atmosphère du récit est empreinte d’une musicalité tout à fait… singulière.

Le libre arbitre ? Penser au mot Violent évoque pour moi ces vers d’Apollinaire. Où réside ma liberté d’y penser ou non ? Quelque part, dans un coin de ma tête, il y a ces deux vers d’Apollinaire qui ont laissé dans mon cerveau leur empreinte et cette association entre Vie lente et Violente. Une expérience, la lecture d’Apollinaire, a modifié à jamais ma configuration mentale et, depuis, je ne suis plus libre de penser comme je l’entends.

Tout à la fois évasion philosophique, exercice ludique et hommage au compositeur John Cage, le beau livre de Albanese tisse en toile de fond l’esquisse d’une morale individuelle, ou peut-être individualiste, fondée sur la raison et, avant tout, sur la liberté.

Antonio Albanese
Est-ce entre le majeur et l’index, dans un coin de la tête que se trouve le libre arbitre ?
L’Age d’Homme, 2013, 85 pages

L’auteur :

Né en 1970, Antonio Albanese est un musicien et auteur lausannois. Titulaire d’un master de la Manhattan School of Music, il partage aujourd’hui son temps entre l’écriture et ses activités d’enseignement à l’ECAL et au gymnase de Beaulieu. Est-ce entre le majeur et l’index, dans un coin de la tête que se trouve le libre arbitre ? est son troisième ouvrage publié aux éditions l’Age d’Homme.

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