Jusqu’ici tout va bien, de Fred Valet

Rentrée littéraire romande

Pour ce deuxième volet de notre série consacrée à la rentrée littéraire romande, nous avons sélectionné le récit du lausannois Fred Valet, qui raconte les neufs mois de grossesse de sa femme (et, de fait, les siens) !

valet_263x420-72dpiLe ton est donné dès la première ligne, sous forme d’avertissement : « Ce livre n’est pas un manuel de super futur papa. Je l’emmerde, le super futur papa. »

Il s’agirait plutôt d’une sorte de journal intime assez déjanté, le journal d’une grossesse vécue – une fois n’est pas coutume – du côté XY de l’affaire. Le parti-pris est original : alors que les livres ou les films (on pense à En cloque, mode d’emploi, Juno ou encore Un heureux événement) qui traitent du thème à travers ses yeux et son ventre à elle connaissent un succès certain – notamment dans le genre de la comédie – les oeuvres écrites par le futur père sont moins populaires. C’est tout l’intérêt du livre de Fred Valet : nous faire vivre ces neufs mois extra-ordinaires par un regard à la fois tendre, narquois, et bien souvent touchant.

Jusqu’ici tout va bien n’est pas une comédie : si le ton est assurément à l’humour et à une certaine légèreté flirtant souvent avec le sarcasme, le propos est tout ce qu’il y a de plus sérieux : qu’est-ce que cela signifie que de devenir père ? Quelles peuvent être les implications d’une naissance pour un couple ? Les doutes, les projets, les réjouissances ? Le rapport aux ex (la « lettre à ne pas envoyer » est magnifique de justesse et de drôlerie) ? Le regard porté sur sa femme, devenue sa « petite citerne amniotique » ? Autant de questions éternelles que Fred Valet partage avec ses lecteurs dans un style vif et tranchant, décomplexé pourrions-nous dire.

Les gynécologues sont sans doute formés pour humilier les maris au moment de la première échographie. Et le nôtre devait être assis au premier rang vu le torse gonflé qu’il affiche sous son stéthoscope. Pense-t-il sérieusement impressionner Avril sous prétexte qu’il a localisé le crâne de notre progéniture avant moi ? Je suis en train d’échouer publiquement à un test de Rorschach cathodique, dans un boucan de laverie automatique, quand le connard diplômé commence à nous détailler l’anatomie de la tache en faisant de petits bruits de bouche à chaque nouvelle découverte.

Il y a chez Valet un sens de la phrase et de la formule évident qui insuffle une belle dynamique un peu punk au récit. Les chapitres sont courts, deux-trois pages rarement plus, de sorte que l’ensemble se relève extrêmement rythmé ; tout au plus pourrait-on regretter parfois que les phrases claquantes se suivent comme autant d’exclamations, aboutissant ainsi à un récit quelque fois un peu décousu.

On a beaucoup aimé ce premier livre: le ton est juste, le style efficace, les questionnements pertinents sans jamais tomber dans le mièvre ou l’attendu.

Fred Valet
Jusqu’ici tout va bien
Editions BSN press, 2013, 117 pages

L’auteur:

Fred Valet, 35 ans, est journaliste et chroniqueur culturel au journal Le Matin. Il vit et travaille à Lausanne. Jusqu’ici tout va bien est son premier récit (et ce n’est même pas un roman, comme il le précise la quatrième de couverture!).  

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Commentaires
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2 commentaires

  1. Bonjour,

    Nous vous invitons le 30 octobre 2014 à Lutry, à la galerie Black and White, où aura lieu le vernissage de l’exposition photographique de l’artiste plasticienne franco-américaine Krista Boggs : 31 photographies composant TRACES LIMINALES, voir le lien en bas de page pour toutes les découvrir). Nous y servirons du vin de Cahors dans le Lot, région de résidence de l’artiste.

    Krista Boggs sera également présente toute la journée du 31 octobre à la galerie BLACK AND WHITE dont voici le lien : http://www.b-white.ch/index.php?option=com_content&view=article&id=9&Itemid=12

    VERNISSAGE JEUDI 30 OCTOBRE DES 18H à Lutry (Suisse)

    Les 31 photographies de l’exposition TRACES LIMINALES se trouvent encore sur le site de la galerie LA CHAMBRE CLAIRE d’Annecy (de la fondation Salomon).

    http://www.chambreclaire.fr/

    Ma démarche photographique se situe autour du concept de liminalité. L’espace Liminale peut décrire un seuil, un état d’esprit où des frontières s’effacent et où nous restons en suspend entre deux, prêts à traverser la limite entre ce que l’on était et de ce que l’on va devenir; un état de séparation et de réincorporation. KRISTA BOGGS

    Jérôme Piot / collaborateur de Krista Boggs
    Le Bourg
    46240 Beaumat
    tél: 06 09 09 54 38

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