Critique du film « Ils » (attention, ceci racconte en partie le film: à ne pas lire si vous pensez aller le voir !!)
Mon avis est mitigé: d’un coté un film qui ne tombe pas trop dans les pièges du genre, et de l’autre l’impression frustrante d’une dernière partie bâclée.
L’affaire était mal engagée, avec la mention « histoire inspirée de faits réels » en début de film. Le problème c’est que cela ne veut rien dire: quelle partie du film, quel élément est inspiré d’un fait réel ? que signifie inspiré ? Cette indication semble suffisante pour dédouaner les auteurs des insuffisances du film, à commencer par des personnages sans profondeur psychologique. On aurait pu rendre l’intrigue bien plus passionnante, et donc effrayante, si les protagonistes ne se trouvaient pas parachutés dans le film, comme tombés du ciel. Et ce ne sont pas les quelques bribes de dialogue qui permettent d’ajouter de la profondeur! Néanmoins, le jeu des acteurs est réussi, et je les trouve plutôt crédibles.
Dommage également de n’avoir pas plus exploité le contexte géographique: les premiers plans s’ouvrent sur des paysages roumains qui semblent extrêmement prometteurs pour un film d’épouvante: vues grises de Bucarest, des rues glauques… Or la totalité du film se passe dans une grande maison abandonnée, ou en forêt de nuit: dans le genre original, on aurait pu mieux faire! On ne peut s’empêcher d’y voir un mix du « projet blair witch » (pour la course en forêt) et de « The ring » (pour les diverses scènes dans le noir avec la TV allumée). J’ai par contre apprécié la sobriété (rare) dans la manière de gérer la lumière: il n’y a certes pas de recherche purement esthétique, mais la très faible luminosité est parfaitement dosée et participe à la pesanteur de l’atmosphère. L’absence d’effets spéciaux est également très positive.
Grosse déception par contre pour le derniers tiers du film: plus généralement, le film va en dé crescendo, avec une première partie de la scène de la maison prenante et angoissante, pour se poursuivre avec des scènes de forêt qui traînent parfois un peu en longueur. La dernière partie dans les égouts est décevante: on cherche vainement un sens à tout ceci, le cadrage et la texture de l’image façon « jeu vidéo » est ennuyeuse et stéréotypée, et surtout le scénario est gravement bâclé: pourquoi n’avoir pas travaillé le thème du sadisme avec plus de profondeur ? On aurait voulu descendre dans les bas-fonds de la perversité humaine, on aurait aimé que le sadisme soit mis en scène, qu’il se passe quelque chose… Or cette dernière partie est une coquille vide qui, logiquement, ne peut déboucher que sur une fin en queue de poisson. D’une manière générale le film est bien trop court pour avoir le temps de construire quelque chose: bien que l’armature soit solidement installée, on tombe dans l’absurde (et de l’absurde, il n’y a parfois qu’un pas jusqu’au comique), dans le déficit de sens: il manque un certains nombre d’éléments que les auteurs n’ont pas pris le temps d’installer pour faire de leur film un bon film.