La causerie Fassbinder, de Jean-Yves Dubath

Dans ce roman singulier, l’auteur de « Gainsbourg et le Suisse » évoque l’oeuvre de Rainer Werner Fassbinder, cinéaste allemand décédé en 1982 à l’âge de 37 ans et qu’il a côtoyé.

Roman ? Vous avez dit roman ? A l’évidence, le texte semble vouloir échapper à cette classification, pourtant revendiquée en sous-titre. Sommes-nous dans un univers de fiction ? Y trouve-t-on quelques uns des codes du genre ? Il n’y a pas réellement de trame ici : cinq amis discutent, et l’on ne sait d’eux que leurs prénoms. Foin de contexte, foin de décorum, foin d’intrigue romanesque : Dubath plonge son lecteur dans le vif du sujet, sans introduction, au risque de dérouter ceux d’entre eux qui n’auraient du maître allemand qu’une connaissance très vague…

AXEL – De l’Allemagne, vieux sujet, Rainer Werner Fassbinder, qui devait défrayer la chronique des années soixante-dix, user l’adversaire, Rainer Werner était le poids ; il en était les miracles ou le bombardement de Dresde, il en était aussi toutes les erreurs, et les forêts et tous les errements de leurs sentiers ; et voilà pourquoi sans doute nos habitudes nous ont conduits à regarder un nombre considérable de films signés Rainer Werner Fassbiner, et l’on ne retrouve pas tous les jours une sorte de Catherine II sur son chemin…

Ne le nions pas, le texte est ardu, difficile d’accès : pour ma part, je n’y suis pas entré sans mal. Novice absolu en matière de cinéma allemand de la deuxième partie du XXème siècle, ignorant tout de la vie et de l’oeuvre de Fassbinder, je me suis rapidement trouvé confronté à une alternative : renoncer simplement, ou accepter de me laisser embarquer dans le récit sans chercher à tout comprendre. Ce n’est qu’à cette condition – après avoir accepté de lâcher prise – que j’ai pu commencer à profiter de l’écriture très maitrisée de Dubath, des réflexions qu’il glisse au-travers des protagonistes, de cette description parcellaire d’une Allemagne, mal connue sous nos cieux latins. Et puis, d’une certaine manière, la postface rédigée par Pierre Yves Lador m’y a encouragé : parlant du livre, lui-même relève qu’ « on pourrait dire qu’on n’y comprend rien comme tel héros de conte traversant une forêt enchantée »… Une forêt dans laquelle il vaut la peine d’entrer : au-delà de références nombreuses et de clins d’œils d’initiés, on y découvre quelques pépites, on s’y laisse entrainer, on s’imprègne de l’ambiance de films que l’on a pas vus mais qu’on se plaît, par jeu, à imaginer. Qu’on se réjouit de découvrir, surtout, et c’est sans doute là l’une des qualités du livre : donner envie.

De Fassbinder, au sens biographique, on n’apprend que peu de choses : l’accent est mis sur l’oeuvre, les conditions de son existence, l’entourage du cinéaste également, cette « ménagerie » théâtrale dépeinte avec talent; ne reste plus qu’à découvrir les films et, sans doute, ensuite, relire Dubath.

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