La folie de Weiss, de Jeremy Tierque

Un jeune homme, interné de son plein gré en institution psychiatrique, demande à rencontrer un journaliste. Il lui raconte les raisons qui l’ont poussé, il y a quelques années, à partir de chez lui et à découvrir le monde, et celles qui font qu’il ne quittera plus cet univers protégé.

Avec La folie de Weiss, Jeremy Tierque propose une quête initiatique classique, qui respecte les codes du genre mais aussi ses clichés: le narrateur part sur les routes, il est amené à rencontrer diverses personnes (deux pêcheurs, un pasteur, un clown, …) qui l’aideront ou qu’il aidera, ou qui permettront d’amener une réflexion sur un thème particulier. Ainsi par exemple, la question politique des inégalités nord-sud est-elle abordée en filigrane de l’ouvrage. La relation maître-élève constitue un schéma récurrent qui traverse le récit (le vieux pasteur donne un enseignement à Weiss, lequel transmet à son tour ce qu’il a appris au journaliste…).

Bien que la quatrième de couverture ne le précise pas, il nous semble que ce roman qui flirte avec le merveilleux trouve sa place dans la catégorie des livres « jeunesse » : à condition de le lire comme tel, c’est un livre agréable qui plaira sans doute à un lectorat adolescent, tant cette période est souvent celle des questionnements philosophiques développés par l’auteur (le bien et le mal, Dieu, le sens de l’existence terrestre…). On regrettera toutefois le côté trop caricatural de certaines situations (la division du monde en deux, entre un occident riche et égoïste, et un « hors-monde » exploité, forcément victime de la cupidité et des manipulations du premier, ou encore cette idée d’une nature belle et intacte, opposée à un être humain destructeur et égoïste), amenées d’une manière manquant parfois de finesse. Quant au style, fluide et neutre, il rend la lecture de l’ouvrage aisée, sans offrir toutefois de surprises. 

– Un jour, cet enfant deviendra un homme, dit Sophie, voyant de loin l’enfant exposé au ciel par ses parents et à la vue de tous. Il aura alors le choix entre donner la vie ou la mort, entre aimer et haïr. Ce n’est pas mon premier accouchement Gabriel, mais chaque fois l’impression est la même: un instant où je me sens accompagner le bébé, où je communique avec lui. Ses yeux entrouverts me demandent s’il doit craindre ses frères, puisque les pères s’entretuent. Il me demande comment il va faire pour grandir dans la joie si un jour il devra prendre celle des autres. je sais qu’il ne pense pas forcément tout cela, mais je le pense pour lui; je pleure de joie au début et après je pleure de honte en imaginant les atrocités qu’un tel pourra commettre sur sa vie plus tard.

Jeremy Tierque, La folie de Weiss
Ed. Pierre Philippe, novembre 2013
126 pp.

L’auteur : Jeremy Tierque, né en 1986, de nationalité Suisse et Britannique, est enseignant dans le secondaire.

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